Sürkrüt

Blog de l’atelier de Communication graphique de la HEAR

Daniel Eatock, exposition individuelle de groupe : “One Hundred and Forty Thousand and Four Hundred Seconds / 26 m2 / Title: _________ / Echo / 105 x 148 mm / daniel@eatock.com / NO SMOKING (thank you) / Once Upon a Time… / Actual Size / Utilitarian Poster Falling”, avec Caroline Bluche, Margot Cannizzo, Louison Coulom, Léopoldine Charon, Miklós Ferencz, Marisol Godard, Alban Leven, Charlotte Parisse, Pedro Seromenho, Elsa Varin, Florian Veltman


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Daniel Eatock, Timbre en caoutchouc, 2013. Production : Haute école des arts du Rhin.

L’artiste britannique Daniel Eatock a été invité par l’atelier de Communication graphique pour une résidence qui a donné lieu à une conférence / performance le 21 mars, et se conclura par une exposition – la première présentation monographique de son travail en France –, du 17 mai au 6 juin 2013 à la Chaufferie, galerie de l’école.

Basé à Londres, Daniel Eatock (né en 1975), diplômé du Royal College of Art est un artiste et designer dont la pratique se fonde autant sur son expérience en tant que graphiste qu’elle se nourrit, entre autres, de son intérêt pour l’art conceptuel des années 1960. Souvent réflexive, son approche hybride et multidisciplinaire est emprunte d’humour, d’ingéniosité, de goût pour les classifications, portant un regard critique sur des situations visuellement contradictoires ou paradoxales. Nombre de ses projets sollicitent la participation des autres, suscitant collaborations et situations d’échange, en proposant par exemple des « modèles » à compléter, ou des structures laissée vides. C’est le cas d’Indexhibit, un modèle de site web/portfolio dont il est co initiateur avec Jeffery Vaska, et utilisé par un nombre considérable d’artistes, designers, architectes et autres. Son propre site, créé avec cet outil, est pour lui à la fois un lieu de création, un lieu d’exposition et une véritable archive en ligne. Une monographie consacrée à son travail, Imprint, a été publiée en 2008 par Princeton Architectural Press.

À partir d’une proposition de Jérôme Saint-Loubert Bié, et grâce à des échanges réguliers avec l’artiste depuis octobre 2012, un groupe d’étudiants en quatrième année a conçu avec l’artiste une présentation inédite de son travail qui prend la forme singulière d’une “exposition individuelle de groupe”. Les onze étudiants ont chacun proposé à l’artiste de revisiter ou de réactualiser un travail ou un ensemble de travaux pour l’occasion, ce qui a aussi été déclencheur de propositions entièrement nouvelles, donnant lieu à de nouvelles productions. Daniel Eatock aime en effet se saisir des situations, des hasards, des contraintes et des circonstances singulières, et revendique le fait de « souvent changer d’avis pour faire un tour complet et revenir au point de départ… »

L’exposition sera immédiatement suivie d’une publication conçue en collaboration avec Daniel Eatock, intitulée 26m2, disponible à travers la plateforme d’impression à la demande lulu.com. Ce catalogue sera composé de 740 pages, le maximum proposé par le service en ligne, ce qui représente une surface totale de papier de quasiment 26 m2. Il rendra compte spécifiquement des projets développés avec les étudiants pour cette exposition et sera disponible au moment même où celle ci fermera ses portes, le 6 juin.

Exposition : du 17 Mai au 6 Juin 2013
Vernissage : Jeudi 16 mai 2013, 18h30
Finissage et lancement de la publication : Jeudi 6 juin 2013, 18h00
La Chaufferie, 5 rue de la Manufacture des Tabacs, Strasbourg

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« 32 heures chrono », workshop avec Grégoire Romanet


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Le 2 avril dernier à 10 heures du matin, en ce premier jour de workshop, assis autour d’une table de la salle Prechter, notre équipe de quinze participants (année trois et quatre confondues) attendait avec impatience Grégoire Romanet. Pour seuls indices du déroulé de cette semaine nous disposions de la durée qui nous était impartie et du lieu à investir, autant dire qu’un grand mystère planait parmi nous. La salle Prechter est une pièce de notre école conçue pour accueillir des expositions. Elle n’est que très rarement utilisée et peu connue des élèves. Quelque peu cachée, nous redoutions que Grégoire ne trouve le chemin pour y accéder… Mais il arrivait, enfin ! Notre rencontre avec le graphiste pouvait commencer.

 Les fouilles

Comment commencer ? Comment choisir une piste de travail ? Partir d’une thématique ou plutôt de nos contraintes matérielles (scotchs de couleurs, imprimante noir et blanc, papier A4 et A3, ficelle) ou encore de l’historique du lieu ? Nous nous sommes mis d’accord pour entamer des recherches sur la salle Prechter et donc la rue Prechter que l’on voit à travers la baie vitrée de la pièce. Quelle est leur histoire, quelles sont leurs anecdotes, leurs origines ? La machine était lancée. À notre grande satisfaction, l’exploration de ce lieu a révélé une histoire d’une grande richesse, beaucoup de pistes, de détails surgissaient au fil du temps, autant de matière à interroger et à donner à voir. Par petites équipes nous nous sommes répartis le travail d’investigation afin de déterrer les fragments oubliés de la rue et réaliser une véritable fouille archéologique du lieu.

Le collectif

Systématiquement nous accrochions nos trouvailles au mur, images, textes, données, dates, références graphiques, afin d’exposer à tout le groupe l’avancement des recherches. L’idée de collectif a été primordiale dans le déroulement du workshop. Nous avancions tous ensemble en rebondissant sur les idées des uns, les images des autres, et par la discussion lors de tours de table. Jusqu’à la production du contenu final nous avons partagé notre stock de visuels, toute la matière récupérée lors de nos recherches.

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Une idée forte est ressortie de notre démarche de «fouilles » et de la configuration du lieu. La salle se situe en effet en dessous du niveau du trottoir : les passants parfois curieux de la rue Prechter jetaient un œil à travers la vitre et regardaient, vue d’en haut, ce que nous faisions. Ce rapport entre la rue et l’intérieur de l’école nous a interpellés, la salle Prechter devenait comme une vitrine à travers laquelle nous pouvions dialoguer vers l’extérieur. D’autre part, l’idée « d’archéologique », le fait de déterrer, de remonter à la surface les différentes couches de l’histoire du lieu nous a beaucoup plu. Nous avions donc l’envie de montrer, à travers un jeu sur les points de vue et les niveaux, les fragments et les éléments historiques redécouverts de cet endroit.

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L’installation

Le projet a pris la forme d’une grille réalisée en ficelle, comme lors de fouilles archéologiques, sur lesquelles nous avons accroché des affiches produites avec les moyens du bord. Chaque image est une interprétation de l’un d’entre nous sur un aspect ou sur l’ensemble de l’histoire du lieu. Le but était de composer depuis l’extérieur une surface de fragments d’images qui prolongerait le niveau du sol ; et de proposer aux visiteurs depuis l’intérieur, par la descente des escaliers, la découverte de l’archéologie de la salle Prechter. L’entrée ne pouvait se faire que par la porte donnant sur la rue ce qui permettait de proposer une vue d’ensemble avant de s’intéresser à la narration des affiches. D’autres formats reprenant des phrases, chiffres, listes, tirées de nos recherches ont été accrochés au-dessus du niveau afin d’attirer le regard du passant, l’amener à se questionner pour ensuite se plonger dans les images.

Un grand  merci de la part de tous les étudiants à Grégoire Romanet pour ce workshop, merci à notre professeur Philippe Delangle de l’avoir organisé et à notre directeur David Cascaro d’avoir permis la prolongation du temps d’accrochage.

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Typographie et design éditorial, un spécimen typographique


Pour ce sujet les étudiants de 4e année étaient invités, à partir d’une sélection de caractères imposés, à réinventer le format du spécimen typographique, objet éditorial présentant un caractère typographique et destiné la plupart du temps à le promouvoir commercialement.
À travers leur spécimen «subjectif», et après une courte recherche historique, les étudiants ont mis en pages et en images un ou plusieurs aspects spécifiques au caractère liés tantôt à son créateur, tantôt à son contexte de création ou à ses domaines d’application.

Un specimen du Baskerville, Léopoldine Charon

Le Baskerville a été créé par John Baskerville en 1756. Ce spécimen présente le caractère en reprenant des extraits du Chien des Baskerville de Sir Arthur Conan Doyle (qui nomma son roman en hommage au typographe), ainsi que des images de son adaptation cinématographique de 1939. Prenant la forme d’une sorte de journal, Il joue sur la re-création de l’espace du livre de poche et de l’atmosphère de l’enquête policière.

 

 

Neeeeeeeeeeeeutralité, Alban Leven

Ce spécimen et son court film dérivé mettent en scène la notion de neutralité évoquée par le caractère Akzidenz Grotesk dessiné par la fonderie Hermann Berthold AG en 1896.

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Courier New, De la machine à écrire à l’art ASCII, Céline Kriebs

Le dessin du Courier New créé par Adrian Frutiger en 1990 est basé sur celui du Courier créé par Howard Kettler en 1956. Ce spécimen présente l’histoire du Courier New illustré en Art ASCII, uniquement réalisé en caractères contenus dans le code ASCII.

 

Aux bords de la pageMarisol Godard
Un specimen d’espace

La Franklin Gothic, créée en 1902 par Morris Fuller Benton, est un caractère utilisé fréquemment dans les installations typographiques de l’artiste conceptuel Lawrence Weiner. En référence à son travail sur le langage, l’énoncé, l’espace du musée et l’espace urbain cette édition propose une illustration de l’œuvre de Georges Perec Espèce d’Espaces à la manière de l’artiste. Il est donc question ici de l’espace du livre, de la page, du mot et de la lettre sur la feuille blanche.

 

Bodoni, Valentin Robinet

Ce spécimen de poche interroge les rapports d’échelle et de corps de texte. Chaque page, présentant un corps du caractère par ordre croissant est un zoom sur le texte introductif du Manuel typographique publié par Margherita dall’Aglio en 1818 après la mort de son mari, Giambatista Bodoni créateur du caractère éponyme.

 

Un spécimen sur l’Optima, Charlotte Parisse

L’Optima fut utilisée par son créateur, Hermann Zapf, pour son faire part de mariage avec Gudrun von Hesse. Le spécimen se compose d’une variation de parodies de faire-parts de mariage «kitsch». Sur chaque double mettant en scène une photographie d’époque, les faire-part insérés à la manière d’un album de mariage, peuvent être retirés pour laisser apparaître une partie de l’image.

 

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Alors, c’était comment ?


Quatre mois, c’est le temps de gestation d’une lionne, la durée pour que ta CAF effectue son premier versement d’APL, la période durant laquelle Nizar Bahloul a été condamné pour sa publication dans Business News. Quatre mois c’est aussi le temps que j’ai passé en échange à l’Université du Québec à Montréal plus connue sous le nom de l’UQAM dans la section design graphique. Pi ma fois c’était ben l’fun.

 

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Dans les airs – Paris > Montréal

L’UQAM est un gros campus universitaire comme on peut en voir dans les beaux films américains. Rien que l’histoire du logo et de la règle d’écriture de l’acronyme de cette université raconte son positionnement international. Plus de trente-cinq départements sont comptés sous son chapeau, tous répartis dans le centre de Montréal.

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Cafétéria pendant une heure de cours – UQAM département Design

Les syndics d’étudiants jonchent les murs, chaque section a sa couleur, les odeurs de café des multiples Second Cup du campus viennent te chatouiller le nez lors de ta course pour attraper ton métro. Oui, parce que l’UQAM a sa propre station de métro…

 

Le métro de Montréal

Je suis donc passée au dessus de l’Atlantique pour avoir un petit aperçu de la manière dont le graphisme est enseigné et manipulé là-bas. Les projets issus de l’école sont reconnaissables, léchés et bien réalisés. Tu pourra te faire une idée de ce dont est capable de faire un étudiant en première année sur le Blog du cours DES-1211 Design graphique introduction, géré par Louis Gagnon (de Paprika), Sylvian Aillard et Louis-Charles Lasnier.

Les techniciens sont eux aussi à l’écoute des demandes des élèves et sont prêts à faire un milliard de tests avec toi jusqu’à trouver le meilleur système pour concrétiser ton projet. L’enseignement quant à lui est très positif. Le choc lorsque les élèves et les professeurs applaudissent lors des présentations. La transmission se fait de manière agréable et l’ambiance générale de l’école s’en ressent. Grâce au soutien concret du corps professoral, les étudiants s’engagent dans des causes sociales en mettant à profit leur savoir-faire. Ce fut le cas lors des manifestions Carré rouge de 2012 où les élèves se sont regroupés pour créer l’École de la montagne rouge. Je n’étais pas là lors des manifestations, mais j’ai eu la chance de pouvoir assister à l’exposition Création en temps de crise sociale au Centre Design de l’école restituant leur démarche. Témoins de l’action, croquis, affiches, making-off du laboratoire, expérimentations graphiques et sérigraphie sur place étaient au rendez-vous.

Novembre 2012- UQAM - Exposition : Création en temps de crise sociale - École de la Montagne rouge

Novembre 2012 – UQAM – Exposition : Création en temps de crise sociale – École de la Montagne rouge

Les enseignants sont donc particulièrement engagés dans leur rôle de tuteurs. C’est au fil des discussions que j’ai découvert leurs projets professionnels et personnels. Notamment La chose imprimée initiée par Judith Poirrier, typographe et professeur de la matière. Son bureau s’est transformé en atelier pour abriter le lieu de recherches. Professeurs et étudiants de différentes écoles de Montréal s’y retrouvent pour travailler autour des questions liées au livre et à la typographie. Il arrive que certaines de leurs expérimentations soient réalisées au Musée de l’imprimerie du Québec où j’ai eu grand plaisir à réaliser un stage. Je conseille vivement d’y aller, Michel Desjardin et Nelson Tousignant se feront un plaisir de faire une visite des lieux.

Les mains de Nelson Tousignant et de Michel Desjardin qui m'ont tant appris - Musée de l'imprimerie de Québec

Les mains de Nelson Tousignant et de Michel Desjardin qui m’ont tant appris – Musée de l’imprimerie de Québec

 

Atelier reliure - Musée de l'imprimerie du Québec

Atelier reliure – Musée de l’imprimerie du Québec

Le musée s’associe souvent à des professeurs de l’UQAM pour générer des projets et des commandes. J’ai d’ailleurs connu cet endroit grâce à un projet soummis par Ron Filion Mallette, enseignant et chercheur dans le domaine du design d’interaction. Nous avions pour commande de réaliser la ligne de temps de l’histoire de l’imprimerie du Québec pour un rendu écran. Son blog qu’il tient avec Sylvain Allard est très riche en contenu dans le domaine du numérique.

Résumer quatre mois d’expériences si intenses dans un post est un exercice difficile. Mais j’imagine que tu l’as compris, Montréal is the place to be ! Le mieux serait encore d’aller voir ça par toi même. Je t’encourage donc à faire des économies dès maintenant, en plus une fois là-bas tu pourras te bâfrer de bacon et d’œuf frais tous les matins.

Déjeuner typique

(Crédits Photos : issues du projet Correspondance – Margot Cannizzo)

 

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Autour du “Musée imaginaire”, 2012-2013


Nouvelle sélection de travaux pour le sujet de Musée imaginaire dans le cadre du cours “Design graphique éditorial” par les étudiants de l’atelier Communication graphique, année 3.

Cette édition 2012-2013 (premier semestre) fait suite à celle des travaux réalisés au deuxième semestre 2011-2012 (accompagnées d’un descriptif plus complet ici).

La réalisation des projets (impression et reliure) a été suivie par Ju-Young Kim de l’atelier Livre et par Pierre Speich de l’atelier Numérique.

 

Des originaux, de Nicolas Bailleul3

Une œuvre évolue avec le temps. La peinture ternit, le métal rouille, la pierre casse, l’encre s’estompe et les pages finissent par se déchirer. La matière est en constante évolution et la durabilité de l’image qu’elle transcende dépend uniquement de notre mémoire.
La reproduction d’une œuvre permet de diffuser l’image à un grand nombre de regardeurs, qui ainsi perdure le plus longtemps possible dans notre imaginaire collectif. Numériser l’image ou simplement la photographier c’est lui permettre de se dématérialiser et d’empêcher le temps de la détériorer. Mais suivant la façon dont elle a été scannée, photographiée, recadrée, retouchée et compressée, l’image numérisée évolue tout autant qu’une œuvre physique. Une fois mise sur le Web, une image peut être récupérée puis remise en ligne très facilement.
Entre ces changements d’espace, rien n’empêche l’auteur de cette action de renommer l’image mais aussi de la modifier directement. C’est ce qu’il se passe avec la démocratisation d’Internet. Pour une même image, il existe des milliers de pages différentes, dont les contenus sont très souvent détachés de ce que voudrait transmettre l’auteur de cette œuvre.

Cet ouvrage présente une série de chefs d’œuvres qui m’ont particulièrement marqué. Plutôt que de montrer des reproductions imparfaites, je présente autant de dérivés de ces œuvres qui ont été déplacées et remaniées dans un vaste espace virtuel.

Associer au numérique l’idée d’immatérialité est-il justifié ? Peut-être que ces captures d’écrans sont autant d’œuvres différentes dans autant d’espaces d’expositions qui de plus en plus, ignorent le ressentis du spectateur face à l’œuvre originale.

 

J’aurais vraiment aimé que Kesselskramer n’existe pas, de Julie Deck Marsault

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Texte d’introduction de la publication :

La génération de mes parents a accédé à l’art à travers les livres, les magazines ou les diapositives, quand ils ne pouvaient voir les œuvres dans des musées. Je fais partie d’une génération qui, à travers l’écran d’ordinateur, accède à une multitude d’images sans avoir à se déplacer. Nous consommons des images chaque jour lors de balades sur la planète Web, en masse et à une vitesse folle. En fait, on ne consomme même
 plus, on survole les images, on les prend et les replace ailleurs. Nous avons développé un besoin d’accumuler, de rassembler et de mélanger des images d’origines diverses, images d’auteurs et images vernaculaires, images anciennes et images neuves, travail personnel et travail des autres, photographies, dessins, vidéos, etc., pour nous re-créer un univers visuel propre.
La plate-forme de micro-blogging Tumblr en particulier a fait exploser cette pratique par son accessibilité et sa facilité d’utilisation. Nous pouvons tous constituer des paysages d’images rassemblées, complètement désolidarisées de tout contexte d’origine. Les sources et informations deviennent secondaires, souvent il est même difficile de les obtenir. Nous fabriquons virtuellement des murs de musée mais sans les cartels. Nous rendons les images anonymes.

Ce phénomène a sûrement été influencé par des artistes qui utilisent ce système d’accumulation. Par exemple, Hans Peter Feldmann décida que son travail d’artiste serait d’accumuler des images déjà produites, déjà créées par d’autres. Une grande collection constituée d’une multitude de petites collections. Il semblait dire «ceci, ceci et ceci m’intéressent autant les uns que les autres et je leur donne une valeur égale en les présentant au public». Il a fait entrer dans des musées des images que l’on classe habituellement dans des catégories plus ou moins valorisées. Cette démarche questionne le statut de celui qui l’entreprend. Quelle est sa place face aux œuvres qu’il utilise, face aux sources, face à
la reproduction, face à la ré-appropriation ?
 Sur Tumblr, la démarche se rapporte à une accumulation muette. Pas de confrontation, pas de mise en parallèle.

En réaction à cet accès facile aux images, j’ai fabriqué un livre dans lequel on ne trouve que des images issues de livres que je possède ou que l’on m’a prêtés. Mais je photographie ces objets avec la webcam de mon ordinateur pour garder cette étape supplémentaire de reproduction qui est le passage par l’écran. Les images deviennent moins lisibles, moins visibles. Je me suis inspirée de la mise en page des blogs Tumblr, il sera possible d’ajouter de nouvelles images encore et encore. Et j’ai provoqué deux vitesses de lecture, ainsi vous pouvez le feuilleter pour voir les images rapidement mais si vous voulez accéder aux légendes correspondantes, il faudra déplier les pages du livre.

 

Octets, de Lucas Descroix

Octets - Lucas Descroix


Cette publication de mes références s’appuie sur l’observation suivante : la quasi-totalité des images que nous entourent aujourd’hui sont – ou ont été – des fichiers numériques. Elles sont alors un ensemble de données codées, un format de compression, un nombre d’octets. Cette réalité, celle d’une fragilité, m’a amené à mettre à jour une structure et à la questionner. Des images.jpg à la typographie.ttf, tout est altéré, abîmé, voire détruit. Les références utilisées sont celles des fichiers plus que de leur contenu.

 

\| \not\!\|, de Léna Robin

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Mon édition s’appuie sur un constat : chacune des mes références peut être rattachée soit à la notion d’ordre (graphisme épuré à la Kenya Hara, images religieuses tribales, listings de John Baldessari…) soit à la notion de désordre (performances de Ewa Partum, groupes de graphistes engagés, street-art…). Rassemblées dans un volume unique, elles sont initialement classées dans l’une des deux parties désignées par des symboles géométriques et universels : \| et \not\!\|.
L’ensemble des pages est remanié de façon aléatoire et re-disposé au hasard. La reliure accidentelle vient troubler l’ordre initial du livre et propose un vis-a-vis d’images parfois inattendu. Chaque édition devient unique.
Un poster glissé dans le livre, à la manière d’un erratum, permet de reconstituer grâce à un chemin de fer l’agencement des pages, tel qu’il était prévu au début.

Extrait de l’introduction :

« Cette édition est le fruit d’un constat. En tentant de rassembler mes différentes expériences visuelles, je me suis rendue compte que l’ensemble qui résultait était d’une grande hétérogénéité. Quelques jours plus tard, je remettais la main sur le dépliant d’une exposition à laquelle je m’étais rendue un an auparavant. Je regardai à nouveau attentivement le document ; il expliquait la façon dont certaines tribus canalisaient par la pratique de rituels spécifiques les esprits et forces négatives, présents dans leur vision de l’univers. Or, cette fois-ci, ce ne furent pas les images et leur description qui m’interpellèrent, mais le nom de l’exposition elle-même : « Les Maîtres du Désordre ».
Immédiatement, j’établis un parallèle entre cet oxymore et des lectures et réflexions personnelles que j’avais eues récemment. Cette dualité entre chaos et organisation allait être déterminante dans la suite de mes recherches.

De ce brassage d’images hétéroclites résultait une constante. De chacune de ces images se dégageait à chaque fois la notion de \| ou de \not\!\|, que ce lien soit rationnel ou subjectif, qu’il s’exprime par la forme ou par le sens.

Mêler \| et \not\!\| dans un même ouvrage s’est avéré compliqué. Un livre relié étant régi par un ordre de pages établi, il fallait que le \not\!\| puisse lui aussi s’exprimer dans une structure si rigide. J’ai donc choisi de laisser le hasard opérer et de laisser les pages se réorganiser par elles-mêmes pour déstructurer cette édition, la court-circuiter.
Je voulais que la couverture du livre soit blanche, salissante. Pour être bientôt défraichie.
Dans un livre où règne le \not\!\|, le \| vient reprendre sa place. »

 

Cinégénie, d’Iris Winckler

CINEGENIE

Parmi toutes les formes d’expression artistique, le cinéma tient une place privilégiée dans mon imaginaire. Souvent, une œuvre artistique retient mon attention lorsqu’elle entre en résonance avec un film. J’ai décidé de structurer mon musée imaginaire autour d’un circuit de réseaux regroupant motifs, figures ou thèmes qui me sont chers.

Le format à l’italienne rappelle celui de la pellicule 35mm, il s’impose comme une évidence tant du point de vue de la prise en main que de la référence à l’image filmique.

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