Typo en mouvement – table ronde autour de l’exposition
Le 11 février dernier se tenait la table ronde organisée dans le cadre de l’exposition Typo en mouvement.
Antony Enkirche, directeur artistique et co-créateur de Typocamp, s’entretenait avec trois invités :
Bob Cerfontaine, directeur de création chez Monsieur Girafe, studio de création graphique et d’identité visuelle, à majorité en destination de la télévision ;
Laure Chapalain, designer graphique et dessinatrice, elle enseigne à l’école de l’image des Gobelins depuis 2007 dans la section « Graphisme et motion design » ;
Gwenolé Jaffredou, motion designer et directeur artistique indépendant à Rennes.
Antony Enkirche : À quel stade de maturité est arrivée aujourd’hui la typographie animée ?
Laure Chapalain : L’âge d’or de la typographie animée était dans le cinéma des années mille neuf cents soixante-dix. Jusque dans les années deux mille, il y a eu de très beaux génériques. Aujourd’hui, la typographie n’est plus l’actrice principale du générique, sûrement parce que les réalisateurs préfèrent mettre en avant les belles images que sont capables de faire les caméras.
Bob Cerfontaine : À la télévision, on voit surtout des animations de textes mais pas de caractères (à part sur Fox Kids, ou le supplément de Canal +). On cherche à faire passer les informations avant tout.
Quelles sont les tendances en animation de caractères ?
L. C. : Dans les génériques au cinéma, la grande mode est à la typo en 3D, pour faire rentrer le spectateur dans l’écran. Par exemple, dans le générique de ZombieLand (2009), les comédiens interagissent avec la typo ; ou dans celui de Panic Room (2002), où la typographie est intégrée à l’architecture présente sur les plans. Moins récement, la typographie vole dans le générique de Superman (1978) ; et en nettement moins récent : le générique de My Man Godfrey (1936).
B. C. : À la télévision, la 3D est abandonnée (à part dans les JT), et c’est tant mieux. On a plutôt un retour au flat design par l’image sur Photoshop. Il y a aussi un retour aux typos scripts.
L’animation d’une typographie donne un nouveau sens par rapport à la typo qui en donne déjà un ?
L. C. : Elle peut ajouter un message : on a l’exemple le plus probant avec l’animation de Saul Bass pour le générique de Psychose (1960), où des bandes ceindent la typographie pour suggérer la schizophrénie du personnage principal du film. Par contre, quand l’animation fonctionne mal, elle peut contredire le message…
Les musiques jouent aussi un grand rôle dans la compréhension de l’animation.
Est-ce qu’on bricole encore aujourd’hui ou bien tout passe par l’ordinateur ?
L. C. : En 1995, le générique de Se7en est gratté sur la pellicule. En 2004, le générique de Dawn of the Dead est réalisé avec des giclures de faux sang au sèche-cheveux.
B. C. : À la télévision, on a par exemple le générique Les Aventuriers de l’art moderne (série sur Arte) en stop motion réalisée entièrement à la main , sauf la typo et c’est bien dommage !
L. C. : David Carson expérimente l’animation de typographies sous plusieurs formes dans son film The End of Print (1995).
Qu’est-ce qui est de bon goût, qu’est ce qui est de mauvais goût ?
L. C. : Si ça sert le propos, c’est de bon goût.
B. C. : À la télévision par contre, les typographies sont imposées peu importe le contenu de l’émission : pas forcément mauvais goût, mais absence de choix.
Où est le too much en animation de typographies ?
B. C. : C’est plutôt du too less en télévision.
L. C. : Au cinéma, le too much est dû aux modes : par exemple, on a eu pendant un an les cartes géographiques suite à Game of Thrones, etc.
Cette table ronde a abordé l’animation de typographie et de caractères en étant fidèle aux vidéos et installations montrées dans l’exposition Typo en mouvement. J’ai regretté cependant qu’une ouverture ne se fasse pas concernant les caractères asiatiques, arabes ou hébraïques. Ils doivent sûrement poser des questions d’animation plus larges.
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Typo en mouvement
du 20/11/2015 au 05/03/2016
Le Lieu du design, Paris
Catégorie: Observatoire | Laisser un commentaire