Mot-clé : livre
Élise Gay & Kevin Donnot (E+K)
Avec HTML2Print, nous avons balisé tous les contenus dans un langage qui s’appelle Markdown et YAML, tout le livre est rangé dans des dossiers avec des petits fichiers textes et nous avons développé un backoffice, un CMS custom [...] Il y a un système de gestion de contenu en PHP comme sur un site web qui vient récupérer tous les contenus et qui les preprocess pour générer des pages HTML, qui sont ensuite interprétées avec une feuille de style CSS particulière pour l'imprimé.
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KD : Nous commençons toujours par faire des maquettes type, sur un site web ou sur livre c’est toujours pareil : nous réalisons des maquettes statiques pour réfléchir à l’aspect visuel de la chose. Quant aux sites web, nous faisons aussi des maquettes interactives.
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KD : C’est une logique d’agencement et de combinatoire. L’idée, c’est d’associer des petits outils qui effectuent des tâches minimales, ou de développer de tout petits outils, à l’instar de ce petit système de gestion de contenu. Puis de brancher les choses ensemble pour arriver à un résultat particulier. Pour Coder le Monde, le fait d’avoir balisé l’ensemble du contenu permet de faire des références entre toutes les différentes itérations, les différentes occurrences d’un même terme. Le livre s’ouvre donc sur 48 pages d’index qui viennent donner les récurrences des pages. Il y a un index des noms, un index des noms d’œuvres il y a un index des langages. Il nous paraissait intéressant à lire en tant que tel, c’est intéressant de rapprocher « Farah Atassi » de « Jean-Sébastien Bach » [...] cela créé une espèce de générique qui fait sens et en même temps avec les références de pages, cela produit une sorte de visualisation de données des nombres d’occurrences.
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KD : La programmation permet donc dans ce projet, d’avoir des fonctionnements automatiques. Toute la spécificité du livre c’est qu’à l’intérieur des pages texte, à chaque occurrence d’un nom, d’un nom de projet ou d’un langage, un algorithme produit comme une espèce d’hypertexte, c’est-à-dire qu’à chaque occurrence, on retrouve les références des autres pages où l’occurrence est citée. [...] Cela permet de circuler de façon non-linéaire dans le texte et de rejouer un fonctionnement qui serait hypertextuel, un peu plus proche du web, non linéaire.
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KD : Nous ne générons pas de forme avec, nous générons de la circulation, de l’agencement dans le livre. C’est un élément de structure du livre.
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KD : Il fallait que ce soit flexible, pour effectuer des corrections pas dans l’idée de mettre le livre à jour dans un second temps : parce que la technique d’impression est en offset et est tiré à deux ou trois milles exemplaires, donc nous n’allons pas en faire une mise à jour.
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Habituellement lorsque nous faisons de la publication multi-support, nous faisons le livre imprimé puis nous le déclinons sur une version numérique que nous devons refaire entièrement.
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Nous l’utilisons déjà pour une collection de livres pour l’École d’architecture Paris-Malaquais.
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KD : La publication est aussi publiée sur CAIRN et donc sur le site de CAIRN il y a le même balisage, la même version ; toutes les notes sont automatisées. C’est très adapté pour des livres de textes.
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Nous avons écrit des programmes pour injecter tous les titres du livre, en générer cinquante pour chaque titre, et ensuite nous avons pu les choisir pour les placer sur le livre.
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Le programme peut servir à tous les étages du livre : il peut servir au moment où nous allons travailler sur un caractère génératif, comme dans Coder le monde, ou si nous voulons générer des tracés ou des couvertures comme dans La fabrique du vivant. Il n’y a pas de règle et c’est ça qui nous plait.
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KD : Il est clair que c’est un périodique, ce n’est pas comme un ensemble de livre. Il faut que ce soit lisible comme un ensemble aussi.
Camille Bondon
CB : Alors ça, ça m’a été utile parce que j’ai commencé une pièce sur les archives de tout ce que j’ai lu. Je voulais collecter toutes les premières pages de tous les livres que j’avais lus. Et dans les agendas, j’ai cette archive de tous les livres, tous les films, tout ce que j’ai pu emmagasiner. Ça m’a servi aussi pour retrouver quelques dates, donc je les parcours, un peu comme on parcourt des albums photos, plutôt pour cette impression générale. Ce que je vais le plus relire ce sont mes carnets de travail, où j’ai une archive plus détaillée de toute l’évolution des projets. Là, je suis en train de faire une résidence où l’on crée collectivement des nappes pour des tables, des nappes publiques. Comme archive du projet j’ai commencé à rédiger un journal. En croisant les mails, les sms, les notes dans le carnet, j’ai pu reconstituer toute la genèse du projet. Les carnets me servent plutôt à ça, et aussi pour mémoriser tous les noms qu’on peut me donner, ou que je rencontre, ainsi que d’autres informations que j’y dépose... mais je ne vais pas les chercher tout de suite. Il y a aussi des moments de transition de carnets, où je viens passer en revue ce qui s’est passé dans le précédent, pour voir si j’ai exploré toutes les pistes qui étaient notées. Donc je m’en sers plutôt pour explorer les trois mois précédents. Mais je les garde, c’est mon petit trésor.
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La forme que je préfère pour La mesure du temps, c’est quand je projette la vidéo et que je fais la voix, qui est normalement off, en direct, de manière synchrone avec les gestes. En fait, j’aime rencontrer des gens, et le fait d’envoyer une vidéo dans une exposition, c’est une forme de monstration qui m’excite moins. J’essaye toujours de faire des formes où je suis obligée d’être là, de rencontrer des gens, que ce soit un moment convivial, moi c’est ça qui me plaît. Mais pour une exposition en Suisse, eux préféraient une version continue, diffusée au sein de l’exposition. Du coup on a enregistré en studio avec un copain la voix off pour qu’elle soit nickel et que ça devienne une vidéo autonome. Pour chacune des formes que je fais, il y a plusieurs états. Par exemple, Faire parler les livres est une collection sur les méthodologies de lecture, comment chacun va venir faire des petits points, corner les pages, recopier dans un carnet ou recopier dans des fiches... C’est une performance, mais c’est aussi une installation, et la transcription de ce que je raconte, j’aimerais bien que cela devienne aussi une édition, le contenu textuel de ma conférence en quelque sorte. Souvent dans les pièces que je peux faire, il y a plusieurs états simultanés d’une pièce, qui sont des espèces d’équivalences.Il n’y a pas une forme, je ne sais pas si c’est que je n’arrive pas ou que je ne veux pas arrêter une forme, mais à chaque fois qu’on m’invite c’est un nouveau contexte, et à partir de ce contexte je fais des adaptations.
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CB : C’est une bonne question. Pour tous les projets que je n’ai pas encore le temps de réaliser, depuis quelque temps je les écris, je fais des sortes de courtes nouvelles. Ça s’appelle Les possibles, ce sont des histoires en quelques lignes qui racontent ce que sera le projet, comme si il était déjà réalisé. Et sinon je n’ai pas de réponse à t’apporter. Je pense que c’est une histoire de fréquence. Par exemple, l’intérêt pour les drapés, ça n’est pas venu comme ça, c’était une question qui m’intéressait déjà. Et puis, mon compagnon connaissant cette envie de faire quelque chose avec ça, m’a offert un sac simplement noué en furoshiki[^ Technique japonaise de pliage et de nouage de tissu pour emballer des objets.]. Après, moi, je me suis posée des questions sur les sous-vêtements, et je suis tombée sur des culottes japonaises, un peu comme des pagnes, ce sont des vêtements juste noués, et j’ai trouvé que c’était hyper confortable. Après, on est parti en voyage en Grèce et il y avait du drapé tout le temps, partout où tu regardais, c’était que des toges. Alors, c’est que d’un seul coup, à un moment donné c’est une évidence, c’est partout autour de toi, tu ne vois que ça. Donc tu es obligée de faire quelque chose dessus. Mais ça prend du temps, les pliages de tissus, je pense que la première fois que j’ai commencé à y penser j’étais étudiante à Caen, en 2010. Il y a des projets qui sont là, et ils leur faut peut-être dix ans pour arriver à éclore. Alors qu’il y en a d’autres, par exemple la collection des premières pages, j’ai passé vachement de temps à retourner dans les bibliothèques, à emprunter tous les livres, à demander aux copines qui m’avaient prêté des livres pour pouvoir scanner toutes les premières pages. Donc j’ai toutes ces premières pages, le projet est là, mais il n’a pas encore trouvé d’espace physique pour que je puisse faire ma tapisserie de toutes mes premières pages, comme une sorte de bibliothèque de livres ouverts.
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CD : Les premières pages est un projet avec toutes les premières pages des livres que tu as lu ?
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CB : Oui, tous les livres que j’ai lus pendant dix ans. Si ça se trouve, jamais je ne ferais ce projet. Enfin, pour moi il est déjà fait parce que j’ai déjà beaucoup pensé et travaillé dessus, mais physiquement il n’existe pas encore et je ne sais pas si il existera un jour. Il y a des trucs comme ça tu te dis en fait j’ai passé des dizaines d’heures sur quelque chose qui peut-être ne sera jamais visible. Mais c’est un temps qui sert à infuser d’autres choses.
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CD : Donc tu as noté tous les livres que tu as lu depuis dix ans ?
Mathieu Tremblin
Il fonde en 2006 les Éditions Carton-pâte, une maison d’édition en ligne destinée à accueillir et diffuser une typologie de gestes éditoriaux, en étendant les logiques du livre d’artiste et de l’auto-édition à l’espace du web. En travaillant avec une économie de moyens et les contraintes imposées par la reprographie et le print on demand, il a développé une plateforme qui étend les conditions d’accès libres et non-marchandes de son travail dans l’espace urbain, en distribuant gratuitement des ouvrages sous forme de pdf téléchargeables.
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MT : Ok, revenons à ta question. Tu l’as assez bien identifié, à l’origine les éditions Carton-pâte en 2007, ce sont des fanzines que nous pouvions réaliser avec des camarades issus de mon crew de graffiti et que nous n’avions pas les moyens d’éditer en grande quantité. Il s’agissait de tirages confidentiels diffusés de la main à la main. Ils étaient presque vendus à prix coutant parce qu’ils coutaient cher à produire. Jiem L’Hostis, lui, utilisait vraiment la photocopieuse en collant les photos et le texte pour composer sa mise en page. C’est un parti pris qui existait à cette époque dans le monde du graffiti. De mon côté, je faisais de la mise en page avec des logiciels comme QuarkXpress ou InDesign : des outils liés à la production industrielle du livre. Très vite, je me suis dit que c’était dommage que le cadre éditorial soit tributaire d’une logique marchande. Je trouvais que ce rapport à l’autoédition à l’époque d’Internet méritait d’être repensé. Le mode de production induisait une certaine rareté. Je ne voyais pas en quoi limiter le nombre d’exemplaires apportait quoi que ce soit au travail.
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De fait, avec mon collègue David Renault lorsqu’on a commencé à faire des expositions en duo en 2008, on avait envie de faire des livres d’artiste pour rendre visible tout le travail d’enquête urbaine préalable qui inspirait nos œuvres et nos interventions. Comme on n’avait pas les moyens de faire des tirages à grande échelle, on éditait nous-même. On allait chez le reprographe, on en faisait un, deux, trois exemplaires. On en mettait un en consultation dans l’exposition, et voilà. Parfois, on documentait les œuvres de l’exposition et on en faisait un petit catalogue. Carton-pâte a constitué une réponse en actes à une des questions persistante à laquelle nous étions sans cesse confrontés : que se passe-t-il quand on a un budget de production et que le budget permet soit de produire l’exposition, soit de produire le catalogue, soit de se rémunérer, mais aucun des trois à la fois ? Celle-ci ouvrait à une autre plus précise : pourquoi notre rapport à l’édition devrait-il forcément se plier à des logiques de production industrielle, alors que lorsqu’on travaille dans l’espace urbain, on travaille à l’économie de moyens ?
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MT : La typologie de gestes éditoriaux en question, c’est celle qui part du fanzine et qui va jusqu’au livre-objet, en passant par les multiples supports que l’on retrouve disséminés dans notre quotidien urbain : affiche, autocollant, tract, etc. Il est question de conserver la liberté formelle et conceptuelle qui a pu exister avec les premiers livres d’artiste des années 1960 qui étaient très artisanaux ; certains artistes ont pris le parti de s’affranchir totalement des conventions éditoriales en faisant par exemple disparaître les informations éditoriales, en n’ayant pas de numéro ISBN voir en effaçant jusqu’à leur propre nom. Le passage au numérique permet de dessiner un cadre éditorial professionnel et une traçabilité où ces informations qui deviennent comme des sortes de métadonnées en ex-libris et de rejouer dans le même temps cette dimension bricolée. C’est d’ailleurs la fonction de la jaquette à motif de papier marbré – l’identité de Carton-pâte – qui vient « encapsuler » les éditions du catalogue et indexer les informations du contexte de création, qui dès lors n’ont pas la nécessité d’apparaître dans l’édition même.
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Il s’agit plus de faire un geste éditorial avec une adresse et un contexte de diffusion situé que de faire un livre qui serait diffusé dans les réseaux classiques de distribution tels que les librairies et les bibliothèques. Carton-pâte agrège des logiques propres à l’auto-édition et à l’édition numérique, ce qui permet une flexibilité et une immédiateté à rebours des modalités traditionnelles de publication où les échelles de temps et de financement sont étrangères à celles de la pratique artistique.
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MT : Oui, en quelque sorte. J’avais appelé cette série « croquis d’étude », littéralement Study Sketch. Ce que je fais en peinture a un intérêt parce que je le fais dans un certain contexte. Je choisis un mur et comme je procède la plupart du temps sans autorisation, je n’ai aucune certitude que l’intervention reste ; elle va vraisemblablement générer des réponses ou des interactions multiples et inattendues à cause de cela. Si je fais ce même travail sous forme de dessins, qu’il ne reste plus à voir que le pseudonyme des tagueurs sans leur calligraphie originelle en référence, je soustrais en quelque sorte toutes les questions que l’action sur le terrain va soulever. Le dessin a son autonomie et je préfère que cette autonomie trouve une place dans le quotidien plutôt que dans un espace d’exposition. L’intérêt de l’édition, c’est qu’elle circule dans les espaces du quotidien, qu’elle a une existence dans la vie de tous les jours comme l’art dans l’espace public. On rencontre autant une œuvre urbaine de manière fortuite en marchant dans la rue, que sa documentation sous forme de publication en ligne au détour d’un blog, dans le fil d’un réseau social ou imprimée dans un magazine ou un livre. On arpente indifféremment une ville ou un livre, et l’œuvre est trouvée plutôt que montrée.
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MT : Les Study sketches avait été faits dans la perspective d’un dossier pour présenter le principe de l’intervention dans un cadre qui n’a finalement pas abouti. Pour Tag Clouds Parable, c’est une proposition préméditée. À chaque fois qu’on me sollicitait pour la publication et la diffusion dans la presse de la documentation de Tag Clouds, j’envoyais les mêmes images pour avoir le plus d’occurrences possibles de ce travail. J’avais choisi de ne pas m’inscrire à l’ADAGP parce que je souhaitais que mes images conservent la même accessibilité que les œuvres urbaines qu’elles documentent, et que le contrôle algorithmique de la propriété intellectuelle en ligne y contrevenait. De fait, je savais qu’il serait quasi impossible d’être rémunéré pour une diffusion – puisque les médias préfèrent traiter la question du droit par le biais de cet organisme plutôt qu’avec les auteurs des œuvres –, alors je demandais une copie papier de chaque publication. À l’origine, je pensais découper dans les magazines ou les livres, et épingler variations des mêmes images imprimées comme des papillons pour en faire une œuvre unique, une fois arrivé à une collection assez conséquente. Et puis finalement, ça m’embêtait de recréer de l’unicité alors que ce qui m’importait, c’était la question de l’accès à l’œuvre urbaine par sa documentation et sa diffusion ; je suis reparti sur un projet éditorial. Plutôt qu’être le personnage de la fable, formuler le geste comme une hypothèse éditorial. C’est devenu une sorte de projet de recherche qui me permettait de revenir sur le buzz en ligne de 2016. Depuis 2010 où j’avais commencé cette série d’interventions urbaines, j’avais fait attention à ce que Tag Clouds ne devienne pas viral. Entre autres, parce que je sais très bien que quand une œuvre devient virale, l’auteur devient l’artiste d’un seul projet. Or, Tag Clouds représente un centième de mon travail, ça aurait été un peu ridicule de réduire des années de pratique à une seule œuvre. Cela peut être une stratégie de communication pour certains – un jeu avec l’économie de l’attention –, mais en ce qui me concerne la destination de mon travail a toujours été l’espace urbain et non le marché de l’art. Je ne voulais surtout pas me retrouver dans une situation où les municipalités m’inviteraient pour réaliser un Tag Clouds : la proposition se serait déplacée vers le repeint hygiéniste de ce qu’ils considèreraient comme des murs de tags « moches ». Ainsi, à chaque fois qu’on m’a demandé de réaliser cette intervention dans le cadre d’un programme, j’ai refusé. Et j’ai continué à la réaliser spontanément sans commissionnement et sans autorisation. Le buzz autour de cette intervention m’a fait réaliser qu’entre les années 2000 et les années 2010, le web décentralisé s’est transformé en réseau privé-public avec les médias sociaux. Avant les curieux, amateurs et journalistes allaient consulter les sites web des artistes et y découvraient les éléments de contexte publiés qui les renseignaient sur le processus créatif et le contexte de l’œuvre urbaine. Aujourd’hui, les œuvres urbaines diffusées via leur documentation sur le web sont réduites à des images dont l’intérêt fluctue avec le marché de l’attention. Elles deviennent des éléments d’une conversation plus large que celle qui les relie à leur contexte urbain, comme des sorte de template de mèmes. En remettant récemment en circulation ces Study Sketches, j’ai voulu réintroduire d’autres registres d’images qui renseignent le processus de création, le travail d’observation et de préparation préalable qui correspond aussi au rythme et aux usages de la ville plutôt qu’à ceux, instantanés, des réseaux sociaux.
Julie Blanc & Quentin Juhel
JB : C’était imposé par l’éditeur, parce que c’était moins cher et que nous pouvions passer par des structures en ligne, pouvant livrer en deux jours.
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JB : Sur les chaînes éditoriales, ce n’est pas fréquent pour des designers, mais dans les maisons d’édition, ils se posent ces question-là. Chez Hachette US, cela fait quinze ans qu’ils font des livres avec de l’HTML et du CSS, ce n’est pas très poussé graphiquement, mais ils le font quand même.
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QJ : Quand je disais manifeste, ce n’est pas tant par le discours mais plus par l’objet. Dans le monde de la production industrielle, c’est en fait assez lambda. Pour les graphistes venant des écoles d’art et de design, ce n’est pas vraiment connu ; aux Arts décoratif de Strasbourg – où j’ai suivi un cursus en graphisme – nous étudions ces techniques de production de livre, d’automatisation de mise en page par des algorithmes.
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JB : Quentin dit qu’il n’aime pas le terme « auteur », moi non plus. Mais aussi je n’aime pas le mot « automatisation ». J’évite de le dire car souvent on me rétorque : « Tu fais un livre sans designer !? » ou « tu vas nous piquer notre boulot », alors qu’en réalité l’exécution est programmée, je donne des instructions, la mise en page est programmée mais pas automatisée. Les formes ne sont pas automatiques.
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Il n’y avait pas d’intérêt à le faire pour ce projet-là. Mais personnellement je ne vois pas trop l’intérêt du scripting InDesign, car maintenant nous savons que nous pouvons réaliser un livre avec un navigateur.
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JB : Pour les livres, je compose avec mon outil page.js. Il y a quand même des choses que je n’arriverais pas à produire autrement que par WYSIWYG [What You See Is What You Get], par l’usage d’interface – je n’aime pas trop Inkscape, mais j’aime bien Affinity Designer mais qui n’a pas la même logique qu’Adobe. Je milite pour le libre aussi.
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Nous sommes quand même 2 designers sur les 3 développeurs de Paged.js, ainsi nous avons quand même cette position de dire que nous sommes concepteurs. Ainsi lorsque que nous « programmons » des livres, ce n’est pas de l’automatisation ; composer, c’est un métier.
Garance Dor & Vincent Menu
La revue Véhicule donne aussi lieu à des interprétations ou à des activations lors de moments collectifs comme lors de l’exposition Anthologie de la revue Véhicule, au Cabinet du livre d’artiste, à Rennes.**
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« Les livres font des ami·e·s,
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ami·e·s avec des livres,
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GD : Et du coup ça nous permettait de nous décaler franchement de l’édition conventionnelle. Ce n’est pas un format de livre, ce n’est pas un format non plus de revue. L’idée c’était de passer d’un médium à l’autre finalement.
Marcia Burnier & Nelly
MB : Et c’est vrai que ça a démarré avec de l’impression sauvage et c’est un peu le principe du zine, hein. Je veux dire, pour moi. Après Nelly, toi je ne sais pas ce que t’en penses, mais moi j’ai été assez attachée à l’idée qu’un zine, ce n’est pas un magazine. Il n’y a pas de modèle financier derrière, il n’y a pas de ouais, j’sais pas, de business plan, ou un truc comme ça. Donc nous on a fait des impressions sauvages et puis on l’a fait à 2€ parce qu’il fallait que ça soit quand même accessible, sinon c’était prix libre. Et en vrai, non on n’a jamais… Ça a dû au début, un peu remboursé les cartouches d’encre et peut être un peu tes allers-retours en Ouigo depuis Marseille. J’ai l’impression qu’on a réussi à les financer à un moment donné, mais je veux dire, imprimer un livre de 40 pages en couleur ce n’est pas possible de financer ça avec du prix libre. //ahah//
[…]
N : Non c’est clair, on n’en a jamais parlé. Moi j’aime bien le principe du prix libre, enfin je veux dire je trouve ça chouette, notamment dans des événements comme ça là, je trouve ça chouette qu’il puisse y avoir cette pratique du prix libre. Surtout quand derrière on n’avait pas trop de frais et que du coup, c’était un peu « hippie » déjà ça, mais que ça venait un peu du cœur quoi, on avait un peu un truc de, « bon on n’a pas l’impression de se faire carna parce que parce qu’on est en train de mettre du prix livre ».